Evelyne avait cinq ans, elle ne pensait qu’à jouer, courir, chahuter dans l’appartement… Et pour ses parents elle était plus que vive, elle devenait « excitée » Ils s’en inquiétèrent… Le pédiatre consulté les rassura en préconisant une aire de jeu à la taille de l’énergie de leur fille. Aussitôt dit aussitôt fait, ils se mirent en quête d’un « bout de terrain » à la campagne … …de plus de 22 000 mètres carrés à Saint-Jeannet dont ils tombèrent follement amoureux avant même de l’avoir totalement visité. Jean, pour parfaire sa santé fragilisée par un asthme juvénile passait ses vacances dans les Alpes de Haute Provence…au Fugeret … Son meilleur copain était fils de paysan et Jean passait son temps à l’aider à faire les foins, les moissons, ramasser les pommes de terre, et garder les moutons… Son rêve, à l’époque était de devenir berger. Quelques années plus tard, ces deux enfants ont uni leur vie pour le meilleur et pour le pire, avec une préférence intuitive pour le meilleur !!! - A la découverte de l’Olivier
Un jour, aux alentour des années 1983, ils eurent envie de rénover l’olivette qui comportait, environ, 200 oliviers de variétés locales anciennes pour la plupart… A l’époque les oliviers étaient délaissés, les olives peu récoltées et les moulins fermaient les uns après les autres… « l’huile, ce n’est plus rentable» disait-on au pays. Il fallut débroussailler la friche, puis débarrasser les troncs du lierre et enfin rabattre les arbres les plus hauts avant de savourer la première récolte. Parlons-en de cette première récolte, tous les amis furent réquisitionnés dans un joyeux « bordel ambiant »… Quelques arbres furent délestés de leurs olives, puis la séparation des feuilles et des fruits engendra les fous rires en hommage à la créativité d’Alain (un philosophe dans son genre) qui incita ses amis à jeter feuilles et fruits sur un filet dans la pente du chemin soutenant que le poids des unes et des autres les séparerait !!! Ensuite ce fût le rituel du moulin : quel merveilleux souvenir que ce moulin « Génois» en bordure de route, près d’un cours d’eau, avec son vieux moulinier, à l’œil malicieux qui a vu venir cette bande de joyeux drilles avec autant de récipients pour l’huile que d’olives !!!! Dans un moulin il y avait toujours un poêle pour brûler les « grignons » (c’est le restant séché des noyaux et de la pulpe des olives après l’extraction de l’huile)… Il y a toujours aussi une odeur âcre d’huile qui flotte dans une atmosphère humide et froide de l’hiver … A l’époque où les olives se ramassent, le vin nouveau sort des barriques, alors, on vole les premières gouttes d’huile qui sortent des « scourtins » (disques en fibre de coco, ou de Nylon) afin de la recueillir sur des tranches de pain grillé à même le poêle (à grignons) préalablement « râpées » d’ail et on déguste l’or liquide de la Méditerranée arrosé d’une rasade d’une merveilleuse piquette de l’arrière pays … Lorsque les olives ont été pendant une bonne heure écrasées, broyées, triturées par deux énormes meules de pierre calcaire de La Turbie et qu’elles se sont transformées en une pâte onctueuse à souhait, le moulinier ouvre les vannes et l’eau inonde la fosse de trituration, l’huile plus légère s’extrait de la pâte et remonte à la surface de l’eau dessinant le plus beau des tableaux éphémères d’art contemporain. Un outil plat appelé « feuille » sert à séparer, plus ou moins précisément suivant la dextérité du manipulateur, l’huile de l’eau . Notre vieil homme malicieux fit un signe secret pour que son ouvrier ne soit pas habile, ce qui nous permit de remplir d’eau huilée tous nos récipients !!! Ce fut la révélation, un amour inconsidéré pour cet arbre et ses fruits, une passion venait de naître. Elle décupla les forces et la volonté de nos deux « oléiculteurs » en herbe qui les a amenés : - à rénover en 1985, 200 oliviers « hors d’âge » composés de quelques variétés locales anciennes
- à réaliser en 1990 une première plantation de 200 oliviers « Cailletiers » cette variété qui est appelée communément « l’olive de Nice »…
Ils saisirent l’occasion d’agrandir en deux fois leur petit domaine afin d’en doubler la superficie. Dès l’acquisition réalisée, ils plantèrent encore du Cailletier, aujourd’hui environ 800 oliviers s’épanouissent de restanques en restanques. En 1998 plantation de 400 Cailletiers en quinconce avec irrigation par aspersion enterrée lors de la mise en place des jeunes plants.
Quelques mois plus tard, la reprise est excellente et les arbres s’épanouissent sous l’œil minéral du « Château de Saint-Jeannet »!!!
Ces différentes générations d’oliviers cohabitent harmonieusement dans un domaine de 4,5 hectares cultivé selon les principes de l’Agriculture Biologique. Voilà pour ce qui est du domaine et de ses plantations mais qu’en est-il des résultats ? - A la recherche du Saint Graal Oléicole
Petit à petit, la passion aidant, la production augmente, l’huile est consommée par la famille et l’excédent est gracieusement offert aux amis. Ceux-ci ne tarissent pas d’éloges à chaque dégustation et Jean, en doute perpétuel (son sport favori), en vint à se demander si ce n’était que grande politesse ou réelle finesse du produit… Il voulut en avoir le cœur net et demanda, à son conseiller oléicole de l’époque, un certain Henri Béranger de l’inscrire à un concours local afin de se mesurer aux autres productions. Aussitôt dit, aussitôt fait, le village le plus proche qui organisait ce genre de concours était, sur la rive droite du Var, Saint Cézaire sur Siagne. L’huile y fut dégustée, et obtint la meilleure note. A ce moment là un grand oléiculteur, auteur d’un livre de référence sur la culture de l’olivier, Félix Erétéro*(1) fit remarquer que cette distinction était usurpée car le domaine ne faisait pas partie du canton. Françoise Camatte*(2), Présidente de l’association organisatrice, eut l’idée de nous remettre le prix spécial du Jury …afin de conserver la lutte cantonale et honorer la performance de notre domaine, un grand merci, Françoise !!! Christian Pinatel*(3), demanda à emporter avec lui cette huile !!! - La naissance d’un Domaine Oléicole
Sur ces entre faits Evelyne et Jean décidèrent de se donner les moyens de leur ambition, grâce au flair de leur ami maraîcher biologique,Pierre Boijout*(4), il engagèrent Maurice Pelluaud, un grand gaillard à barbe blanche et au sourire humaniste… ancien épicier il s’était reconverti au jardinage et après avoir travaillé dans les espaces verts (et par trop chimiques) il souhaitait …exactement ce que La Clémandine avait à offrir. Evelyne, Jean et Maurice vécurent une réelle « histoire d’amour terrienne » la culture d’un antique blé rouge de Bordeaux, le défrichage avec leur fiston, Clément, d’une parcelle récemment acquise, le montage d’une serre, l’entretien du potager, et la cueillette des fruits et légumes présentés artistiquement chaque vendredi soir… Malheureusement Maurice fut emporté par un cancer du colon qui évolua plus que très rapidement en cancer généralisé… Entre temps Thierry Bianchini, recruté lui aussi sur les conseils avisés de Pierre vint aider Maurice à rester attaché à la vie en réalisant ce que celui-ci aurait aimé faire sans en avoir la santé pour cela… André Tonelli, père de Jean, depuis peu à la retraite, s’investit lui aussi a parfaire la qualité de l’olivette en ôtant les ronces et les lierres turbulents, et en organisant la cueillette. Ainsi, en 1998, un an après le passage à Saint Cézaire sur Siagne, tous s’angoissaient du résultat de la première participation de « leur » huile au Concours Général Agricole du Salon de l’ Agriculture à Paris. Le Verdict tomba : Première participation et tout de suite la plus haute marche du podium, quelle joie, quelle fierté pour celui qui souhaitait mesurer « son » huile !!! Maurice s’en alla comme il était venu, sans bruit, et comme sa présence avait été intense, il laissera à jamais un grand vide dans le cœur de La Clémandine. Et le spectacle continue, le Concours Général Agricole aussi et pour sa deuxième participation (1999) le Bronze récompensa les efforts fournis… André Tonelli, sur un différend lié à l’organisation du travail arrêta sa participation, Thierry s’attela à la tâche et, pour sa troisième participation l’ Or vint de nouveau briller sur La Clémandine : L’An 2000 est vraiment dignement fêté par cette récompense… l’impératif commercial s’accentue, de la petite production « offerte » il s’agit maintenant de satisfaire une clientèle de plus en plus nombreuse et fidèle… Georges Rasse*(4), le vigneron voisin propose de commercialiser à sa cave l’huile de La Clémandine : c ‘est tout de suite un franc succès !!! Quatrième participation (2001), l’Or à nouveau, la plus haut marche deux années consécutives que de rêves les plus fous ne viennent subjuguer les belles nuits de Jean !!! Cinquième année de participation, cinq médailles, aucune interruption, quelle performance, même si, l’Or se transforme en Bronze en 2002 !!! Et un jour, l’ennui naquit de l’uniformité… En 2003, c’est l’année de la toute nouvelle AOC Olive de Nice qui fait son entrée au Concours Général Agricole … La Clémandine est un domaine dans lequel les variétés plantées à l’origine n’étaient pas en majorité du Cailletier, les « variétés locales anciennes » sont l’Araban, le petit Ribier, Dent de Verrat etc. et le cota de 95% de Cailletier ne sera atteint qu’en intégrant les plantations récentes. La dernière d’entre elles ( 400 oliviers) ne sera comptabilisée que lorsque les arbres auront cinq ans, l’an prochain !!! Donc le Concours Général Agricole propose de faire participer La Clémandine en qualité d’huile de France, verdict : aucune médaille … et plus dure sera la chute… quelle déception, ses clients qui ne comprennent pas pourquoi ? Ce narcissisme qui souffre, cette ambition qui bat de l’aile et ce sourd sentiment d’injustice après tant d’efforts, d’abnégation, de transpiration. La remise en question est globale, la bouteille d’huile est fragile, trop fragile, une cliente américaine en brise une dans sa valise, un autre à la sortie de son ascenseur, Evelyne et Jean décident lors d’une visite au salon Lux Packs de Monte-Carlo d’investir dans la bouteille Fidji de Saver Glass pour accroître la qualité de présentation du produit. 2004, première année de participation pour le Concours Général Agricole à la catégorie AOC Olive de Nice, nouvelle déception, aucune médaille…deux années sans l’oxygène, sans l’adrénaline du Concours Général Agricole , cela ne peut plus durer… Thierry, sait toute l’attention qu’il porte à l’alimentation des arbres, aidé en cela par le merveilleux Guy de Laborde de Montpezat*(5), toujours prêt à simplifier,imager pour se faire comprendre, toujours prêt à s’asseoir afin de galéjer sur l’actualité en sirotant un verre de vin blanc de notre voisin Georges. Thierry respecte à la lettre les recommandations de notre spécialiste qui les tirent de la comparaison d’une analyse de sol et d’une analyse des feuilles d’olivier pour connaître quels éléments sont absorbés quels sont ceux, soit disponibles, soit en carence, soit en excès. Il respecte à la lettre le processus de récolte, il ne comprend pas ce qui élimine du podium sa production d’une indéniable qualité … d’autant plus que La Clémandine produit exclusivement de l’huile… c’est à dire que les olives que d’autres utiliseraient pour la confiserie, la pâte d’olive sont triturées et que les olives au sol que certains attribuent à l’huile ne sont même pas récoltées !!!.... Tout à coup,il y pense, mais c’est bien sûr, quelques arbres de variétés locales anciennes donnent une « ardence » à l’huile que celle issue du Cailletier n’a pas… Euréka, la solution est toute trouvée : il suffit de faire une piste de ces quelques arbres, de ne pas mélanger leur huile à celle des autres et le tour est joué…cela a fonctionné, 2005, l’Argent vint récompenser la sagacité de Thierry !!! - La Reconnaissance Gastronomique
Corinne Paolini adore le milieux littéraire, elle tient un restaurant très particulier « Un Cœur en Provence, cuisine comme à la maison » *(6) à Saint Paul de Vence, une de ses amies journaliste lui signale l’existence d’un tout jeune domaine oléicole en bio du nom de La Clémandine… Après l’avoir dégustée, elle l’utilise dans une de ses entrées à la carte, et la propose dans sa boutique… L’Hôtel Métropole*(7) à Monte-Carlo vient d’être totalement rénové après de long mois de travaux , le nouveau directeur général, Jacques Messant, souhaite souligner l’ancrage méditerranéen de son établissement par le choix d’une huile d’olive offerte et vendue à l’hôtel. Christophe Cussac, Chef de Cuisine du « Joël Robuchon Monte-Carlo » a la lourde charge de sélectionner le produit, son choix se porte sur La Clémandine, une bouteille de 37,5 cl est retenue, une étiquette est créée au nom poétique de : « Les Olives de La Clémandine » Entre temps un amoureux de gastronomie qui fête en 2005 ses « 40 ans de Passion » le patron de « La Mère Germaine »*(8), une institution de Villefranche sur Mer, décide que sur chaque table La Clémandine sera à la disposition des clients… A « l’’Atelier du Goût »*(9), Jouni, brillant élève de Ducasse et Giovanni réalisent toutes leurs mise en bouche avec La Clémandine, en outre elle est en fort belle place dans la toute nouvelle épicerie fine qu’ils viennent d’ouvrir. A Monte-Carlo, à nouveau, François Pillard le talentueux chef du Grand Large*(10) au Port Palace Hôtel remplace le sempiternel beurre sur table que les clients tartinent à qui mieux mieux en attendant … par un ramequin de sa création dans lequel il dispose un trait de fleur de sel et une lampée d’huile de La Clémandine afin de faire patienter le client dans une atmosphère totalement Sud Elle reste à écrire, aujourd’hui Evelyne et Jean sont encore au début de leur belle aventure d’accompagnement d’un futur grand domaine oléicole… ils songent à consolider cet engouement croissant pour leur huile, ils souhaitent, avec Thierry maintenir la cap sur l’irréprochable qualité de leur production, Ils envisagent de commercialiser dans un an ou deux des olives de Nice en saumure, peut-être même de la pâte d’olive à plus long terme, ils ont le temps, ne pas brûler les étapes, la route est encore longue…et leur passion intacte … … à suivre… *(1) Félix Erétéro : l’olivier, ed Solar *(2) Françoise Camatte: 06530 Saint-Cézaire. Tél. : 04 93 60 29 59 *(3)Christian Pinatel: e-mail:afidol.cpinatel@freesurf.fr. web: http://www.afidol.org... *(4) Georges Rasse : Les Hautes Collines de la Côte d’Azur 06640 Saint-Jeannet *(5) Guy de Laborde deMontpezat, Cedat : email : guycedat@aol.com *(6) Corinne Paolini, Un cœur en Provence Montée de l’Eglise 06570 Saint-Paul Tel : 04 93 32 87 81 *(7) Hotel Metropole Monte-Carlo :4, avenue de la MadoneBP 19 – MC98007 Monaco CedexTel. +377 93 15 15 15 http://www.metropole.com *(8) La Mère Germaine : Quai Courbet - 06 230 Villefranche sur Mer – Tél : 33 (0)4.93.01.71.39 http://www.meregermaine.com *(9) Jouni, atelier du goût 10 rue Lascaris, 06000 Nice Tél. +33 (0)4 9708 14 80 site : http://www.jouni.fr/ email : contact@jouni.fr *(10) François Pillard,Le Port Palace : 7, avenue J.F. Kennedy 98000 Monaco
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